(Bruxelles) Joe Biden a vanté jeudi à Bruxelles lors d’un marathon diplomatique hors du commun l’unité des Occidentaux, mais le président américain en a aussi éprouvé les limites, que ce soit en termes de sanctions ou de posture militaire face à la Russie.

Lors d’une conférence de presse, le démocrate de 79 ans a clamé que l’OTAN n’avait « jamais, jamais été aussi unie ».

Mais alors qu’une journaliste l’interrogeait sur l’absence d’effet dissuasif sur la Russie des mesures occidentales, le président américain, sur la défensive, a laissé percer un certain agacement.

« Les sanctions ne dissuadent jamais. Vous (les journalistes, NDLR) n’arrêtez pas d’en parler. Les sanctions ne dissuadent jamais », a reconnu Joe Biden, un mois exactement après le début de l’invasion en Ukraine, et alors que les civils payent un tribut toujours plus lourd sous les bombardements russes.

Ce alors même que les États-Unis venaient d’annoncer de nouvelles mesures financières, visant les députés russes et l’industrie publique de la défense.

L’objectif, a dit Joe Biden, est de « faire mal » au président russe Vladimir Poutine, pas seulement pendant quelques semaines ou quelques mois, mais « pour le reste de l’année. C’est ça qui va l’arrêter ».

Symboliquement, le président américain, qui contrairement à son prédécesseur Donald Trump revendique le rôle de « leader du monde libre », a sans doute rempli la mission de mobilisation qu’il s’était fixée en venant participer à un sommet de l’OTAN, un Sommet du G7 et un sommet de l’Union européenne.

« Bon espoir »

Les dirigeants occidentaux ont rivalisé de messages d’union et de fermeté, face à la Russie mais aussi face à la Chine, dont Joe Biden a « bon espoir » qu’elle ne vole pas au secours de l’effort de guerre russe.

Mais le président américain a aussi éprouvé les limites de l’action des Occidentaux.

En termes de sanctions par exemple, après les rafales de mesures des premières semaines, les trois sommets n’ont, sans surprise, pas accouché de décisions spectaculaires.

Sur l’énergie, littéralement le nerf de la guerre puisque c’est la principale source de revenus de la Russie, les Américains n’ont de cesse de rappeler que s’ils peuvent, eux gros producteurs d’or noir, décréter un embargo sur les hydrocarbures russes, il n’en va pas de même pour nombre de pays européens, très dépendants du gaz russe.

Alors il y a bien eu jeudi la promesse d’empêcher la Russie d’utiliser son or, ou, selon un haut responsable américain, des discussions pour fournir à Kyiv des missiles anti-navire.

Les dirigeants de l’OTAN ont également approuvé la création de nouveaux groupements tactiques en Roumanie, Hongrie, Bulgarie et Slovaquie, et le renforcement des quatre déjà constitués en Pologne et dans les trois pays Baltes.

Joe Biden a aussi promis une « réponse » si la Russie, comme le redoutent les Ukrainiens et les Occidentaux, utilise des armes chimiques.

Mais le président américain, qui jusqu’ici refuse catégoriquement une confrontation militaire directe avec Moscou, n’a pas voulu dire de quelle réponse il s’agirait.

Et c’est le Français Emmanuel Macron qui a le plus clairement rappelé que les pays de l’OTAN ne voulaient pas « devenir cobelligérants ».

G7 contre G20

Le président américain s’est aussi vu rappeler que la belle unité qu’il vante est jusqu’ici essentiellement portée par les pays développés occidentaux.

Joe Biden a certes appelé à exclure la Russie du G20, pays qui a déjà été expulsé du G8-devenu le G7-après l’annexion de la Crimée en 2014.

Mais il a reconnu que la décision revenait au G20 lui-même, format créé pour promouvoir le dialogue entre vieilles puissances industrielles du G7, et géants économiques émergents comme la Chine, le Brésil ou encore la Russie.

L’Indonésie a fait savoir jeudi qu’elle resterait « impartiale » en tant que pays présidant le G20, tandis que la Chine a déjà estimé que Vladimir Poutine devait avoir sa place lors du sommet prévu en fin d’année.

Le Brésil, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Carlos França devant le Sénat, a fait savoir qu’il était « clairement opposé » à l’idée d’exclure la Russie du G20.

Et au Mexique, autre pays membre du G20, un groupe d’amitié « Mexique-Russie » vient d’être installé par des députés proches du pouvoir.