Il n’y a personne de plus critiqué au Québec que les créateurs du Bye bye. Sauf peut-être l’entraîneur du Canadien.

C’est le prix à payer quand vous réalisez une émission de télé regardée par environ 55 % de toute la population québécoise, et qui obtient 91 % des cotes d’écoute en direct à la télé francophone.

C’est normal de critiquer Radio-Canada quand la critique est justifiée. On lui verse d’importants fonds publics, la société d’État n’est pas parfaite, on n’a pas tous la même vision de son mandat (qui, soyons honnêtes, a toujours été un peu élastique), et il est sain de débattre de l’avenir de notre télé publique.

Mais quand le travail est très bien fait, il faut aussi le souligner.

Pour sa soirée du Nouvel An, Radio-Canada obtient un succès populaire retentissant. À une époque où chacun a le nez sur les réseaux sociaux et les Netflix de ce monde, c’est l’un des rares rendez-vous télévisuels québécois qui rejoint la majorité des Québécois, tous âges confondus. Une telle soirée joue un rôle fédérateur pour la société québécoise, dans un contexte social où les clivages sont de plus en plus importants.

Environ 3,2 millions de Québécois ont regardé le Bye bye 2022 en direct le 31 décembre au soir (parts de marché de 91 %). Les cotes d’écoute d’Infoman 2022 (2,4 millions de téléspectateurs en direct, 77 % des parts d’écoute), En direct du jour de l’An (1,9 million, 65 %) et À l’année prochaine (1,7 million, 61 %) sont aussi impressionnantes.

On aura les chiffres d’écoute finaux dans une dizaine de jours. Mais on sait déjà avec les chiffres préliminaires que le Bye bye 2022, Infoman 2022 et En direct du jour de l’An seront les trois émissions de télé les plus populaires de 2022, tous réseaux confondus. À l’année prochaine prendra le cinquième rang.

Aussi important que les cotes d’écoute : il y en a pour tous les goûts dans l’offre radio-canadienne du 31 décembre.

Même le chef conservateur Pierre Poilievre, qui a passé une partie de l’année à bouder les grands médias, était à Infoman. Ça confirme le statut incontournable de nos émissions de fin d’année.

Le Bye bye était-il trop épicé, pas assez épicé, juste assez épicé ? Chaque téléspectateur a sa propre opinion, et il est (heureusement) impossible de plaire à tout le monde.

En greffant au Bye bye l’humour grinçant et les idées originales de Jean-René Dufort, les talents d’imitateurs de l’équipe d’À la semaine prochaine et le côté rassembleur de l’émission de France Beaudoin qui fait honneur à nos artistes, Radio-Canada a trouvé la formule qui fonctionne pour la soirée du 31. On ne change pas une telle formule gagnante.

Dire que Radio-Canada avait délaissé la tradition du Bye bye à la fin des années 1990 pour des raisons financières. On oublie que durant la décennie 2000, il a été présenté seulement quatre années sur dix.

On se réjouit que le Bye bye soit de retour chaque année depuis 2010.

Un bémol : le mystère financier autour de ces émissions de fin d’année. La société d’État ne veut pas chiffrer les coûts ni dire si l’opération est rentable sur le plan financier. Selon ce qu’on en comprend, ce serait rentable pour Radio-Canada : les revenus de publicité de la soirée du 31 décembre seraient plus élevés que les coûts de production. On comprend mal pourquoi il n’y a pas plus de transparence à cet égard. (Même si Radio-Canada perdait un peu d’argent, ce serait largement justifié en raison des cotes d’écoute.)

Le succès de nos émissions de fin d’année est encore plus spectaculaire quand on se compare au Canada anglais, qui n’a pas de tradition rassembleuse au petit écran pour célébrer le Nouvel An. Le soir du 31 décembre, CBC a diffusé un film puis une émission spéciale avec des invités musicaux (792 000 téléspectateurs, 13 % des parts de marché).

Deux solitudes, deux façons de célébrer le Nouvel An.

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