Que faisiez-vous le 18 février dernier ? Je vais vous aider un peu.

Durant la journée, il y a eu une bonne bordée de neige. Vous avez probablement pelleté. En soirée, vous avez regardé le match de hockey à la télévision. Vous vous êtes couché de mauvaise humeur. Le Canadien venait de s’incliner 4-3 contre les Red Wings de Detroit – de loin la pire équipe de la LNH. C’était la quatrième fois que ça arrivait cette saison. C’était aussi la cinquième défaite de suite du Tricolore, qui venait tout juste d’en perdre huit d’affilée.

PHOTO FRANK GUNN, ARCHIVES LA PRESSE

Artturi Lehkonen a tranché le débat en toute fin de rencontre.

Pas une fois.

Deux fois !

Les partisans réclamaient la démission de Geoff Molson. Le renvoi de Marc Bergevin.

Le congédiement de Claude Julien. Les départs de Carey Price, Shea Weber, Jeff Petry, Tomas Tatar, de l’organiste, de la chanteuse de l’hymne national et de Youppi !. Vous étiez d’accord avec tout ça, et vous avez juré de bouder le Canadien jusqu’en 2028.

Jamais, jamais, jamais vous n’auriez pu prévoir la suite. Que vous regarderiez un match du Tricolore un vendredi après-midi d’août sur votre terrasse. Que le Canadien se qualifierait pour les séries éliminatoires en battant les Penguins de Pittsburgh. En quatre matchs. À Toronto. Grâce à un but d’Artturi Lehkonen ! Un miracle.

« C’est une grosse opportunité que nous avons eue, a reconnu le capitaine Shea Weber. Nous savons que nous avons eu droit à une seconde chance, à une seconde vie, considérant [où nous étions] lorsque la saison a été arrêtée par la COVID-19. Maintenant, c’est officiel : nous sommes dans les séries ! »

Carey Price a été divin. Il n’a accordé que sept buts. Or, les Penguins auraient dû en marquer 13, selon l’algorithme du site de statistiques Evolving Hockey, qui tient compte de la qualité des tirs et du positionnement des joueurs. Le gardien du Canadien a arrêté 21 tirs d’Evgeni Malkin et 11 de Sidney Crosby. Il a bloqué 94,7 % des tirs dirigés vers lui. Une performance exceptionnelle. Pour vous donner une idée, en carrière, son pourcentage d’arrêts est de 91,7 %.

Jesperi Kotkaniemi nous a tous surpris. En mars, il jouait au bout de la ligne orange, à Laval. Je pense qu’il peut découper sa carte OPUS. Il n’en aura plus besoin. Auteur de deux buts, il a vu ses responsabilités augmenter de match en match. Lorsqu’il était sur la glace, à forces égales, le Canadien a tiré 23 fois et les Penguins, 11 fois. Un excellent ratio de 68 %. Franchement excellent pour un jeune attaquant reconnu pour ses lacunes en défense.

Phillip Danault, chargé de couvrir les deux vedettes des Penguins, a montré pourquoi il est considéré comme l’un des meilleurs centres défensifs de la ligue. Comme Kotkaniemi, il a brillé à forces égales. Son trio a tiré 40 fois, en plus de limiter l’adversaire à 25 tirs.

Jeff Petry, Shea Weber et Ben Chiarot se sont aussi distingués. Ils ont joué respectivement 103, 103 et 98 minutes, la majorité du temps contre Crosby ou Malkin. Ce n’est pas de la tarte. Oui, par moments, ce fut difficile. Mais ils ont quand même terminé la série avec 4 buts, 5 passes, 24 tirs réussis et 21 bloqués. Des chiffres costauds.

Enfin, un mot sur le héros du jour, l’auteur du but gagnant, Artturi Lehkonen. Je n’ai jamais vu un partisan porter son chandail au Centre Bell. Je ne connais personne qui l’a réclamé dans son pool de hockey. Un collègue l’a déjà qualifié de « trou noir offensif ». Difficile de le contredire. En carrière, le Finlandais n’a compté que sur 8,5 % de ses tirs. C’est peu pour un attaquant. Au cours des 20 derniers matchs, c’était encore pire que d’habitude : un seul but en 34 tirs. Mais c’est sur sa palette que s’est retrouvée la passe précise de Paul Byron, à la fin de la troisième période. Cette fois, Lehkonen a saisi sa chance. Et marqué.

C’était mérité.

Dans cette série, il a été le meilleur attaquant du Canadien. À forces égales, mais aussi en infériorité numérique, où il a été l’avant le plus utilisé par Claude Julien. En 16 minutes, il n’a donné que deux buts. Considérant la qualité de l’opposition, ça vaut des confettis.

Par ailleurs, cette qualification met fin aux chances du Canadien de repêcher Alexis Lafrenière. Je comprends la déception des fans. C’est vrai que le format de la loterie cette année est injuste. Il est insensé que les Penguins, septièmes au classement général, puissent mettre la main sur l’espoir québécois. J’y reviendrai au cours des prochains jours.

Maintenant, dites-vous que ce matin, à Pittsburgh, ce n’est pas la loterie que les partisans trouvent injuste. C’est le fait que le Canadien, 24e au classement et battu huit matchs de suite à deux reprises, ait encore une chance de gagner la Coupe Stanley.

Un autre petit miracle

Par ailleurs, un autre petit miracle est en train de se produire. Cette fois à Miami.

Vous souvenez-vous des Marlins, aux prises avec 18 cas positifs de COVID-19 ? Ils ont repris leurs activités. Avec 18 substituts.

PHOTO JULIO CORTEZ, ASSOCIATED PRESS

Les Marlins célèbrent une victoire de 4-0 contre les Orioles, le 4 août dernier

Des joueurs ramassés un peu partout. Au ballottage. Dans les ligues mineures. Via des échanges. Un gars vient des Reyes del Tigre, de Sugar Land, dans la Ligue Constellation Energy. Un autre est un lanceur ambidextre à la retraite. Ils alignent même un médaillé d’argent des Jeux de Sotchi en patinage de vitesse courte piste.

« Il y a des gars ici que je n’ai jamais rencontrés avant ! », a reconnu le gérant Don Mattingly.

Le pire ? Ça fonctionne ! Les substituts ont gagné leurs quatre premiers matchs. De façon convaincante, en plus. Ils ont notamment blanchi les Orioles pendant 21 manches de suite.

C’était quoi, déjà, le titre de ma chronique de samedi dernier ?

L’été de tous les possibles.

Ça vieillit bien.