(Kyiv) Au moins 16 personnes ont été tuées et plus de 59 blessées lundi dans une frappe de missiles russes sur un centre commercial « très fréquenté » à Krementchouk, dans le centre de l’Ukraine, un « acte terroriste éhonté » selon le président Volodymyr Zelensky.

« La frappe russe d’aujourd’hui sur un centre commercial à Krementchouk est l’un des actes terroristes les plus éhontés de l’histoire européenne. Une ville paisible, un centre commercial ordinaire [avec] à l’intérieur des femmes, des enfants, des civils ordinaires », a déclaré M. Zelensky dans une vidéo diffusée sur Telegram.

Selon lui, un millier de personnes se trouvaient à l’intérieur du bâtiment, mais « de nombreuses personnes ont réussi à s’en sortir ».

« Seuls des terroristes absolument fous pourraient frapper une telle installation avec des missiles, et ils ne devraient pas avoir leur place sur Terre », a poursuivi M. Zelensky, évoquant une « frappe calculée ».

PHOTO SERVICE D’URGENCE DE L’UKRAINE VIA ASSOCIATED PRESS

Selon le président, les opérations de sauvetage sont toujours en cours et « les pertes humaines pourraient être importantes », un incendie s’étant déclaré sur une surface de 10 000 mètres carrés après l’explosion.

Les dirigeants du G7 ont de leur côté qualifié de « crime guerre » et d’attaque « abominable » la frappe.

« Les attaques indiscriminées contre des civils innocents constituent un crime de guerre », ont déclaré les dirigeants, réunis en sommet dans le sud de l’Allemagne, dans une déclaration qui « condamne solennellement l’attaque abominable » et assure que Vladimir Poutine devra « rendre des comptes ».

Kyiv a demandé une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU sur les derniers bombardements russes contre des cibles civiles en Ukraine, qui se tiendra mardi à 15 h, a-t-on appris lundi auprès de la présidence albanaise de la plus haute instance onusienne.

« À l’heure actuelle, nous avons connaissance de 16 morts et de 59 blessés, dont 25 sont hospitalisés. Les informations sont en cours d’actualisation », a indiqué Sergiy Kruk sur Telegram.

Les secours se concentrent principalement sur le « sauvetage, l’enlèvement des débris et l’extinction des incendies », selon M. Kruk, qui a ajouté que « tous les groupes d’intervention travaillent en mode intense » et que « les travaux se poursuivront 24 heures sur 24. »

« Je tiens à insister une fois de plus : ne négligez pas les alertes aériennes ! » a-t-il prévenu.

Cette ville du centre de l’Ukraine comptait quelque 220 000 habitants avant la guerre et avait jusqu’à présent été épargnée par les bombardements.

M. Zelensky avait précédemment publié une vidéo montrant le centre commercial en feu, émettant de gros nuages de fumée, avec des pompiers et secouristes affairés sur place.

PHOTO FOURNIE PAR LE GOUVERNEUR RÉGIONAL DMYTRO LOUNINE VIA REUTERS

Selon l’armée de l’air ukrainienne, le centre commercial a été atteint par des missiles antinavires Kh-22 tirés de bombardiers à long rayon d’action Tu-22, de la région russe de Koursk.

« Le tir de missiles sur Krementchouk a touché un endroit très fréquenté qui n’a aucun rapport avec les hostilités », a réagi sur Facebook Vitali Maletsky, le maire de Krementchouk.

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, a appelé sur Twitter les soutiens de Kyiv à lui fournir davantage d’armes lourdes et à imposer des sanctions supplémentaires à la Russie.

Mykhaïlo Podoliak, un conseiller du président ukrainien, a accusé sur Twitter ce pays d’être un « État terroriste » et le ministère de la Défense a évoqué une frappe effectuée à dessein à un moment où le centre commercial était « particulièrement bondé », afin de « faire le maximum de victimes ».

L’ambassadrice américaine en Ukraine, Bridget Brink, a assuré, citée par ses services sur Facebook, que « le monde demandera[it] des comptes au Kremlin pour ses atrocités en Ukraine ».

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a déclaré que le monde était « horrifié » par la frappe.

Décrivant la frappe de missile comme « la dernière en date d’une série d’atrocités », le secrétaire d’État a dit sur Twitter que les États-Unis continueraient de soutenir leurs partenaires ukrainiens et feraient « rendre des comptes à la Russie, y compris à ceux responsables d’atrocités ».

Cette frappe russe est « totalement déplorable », a déclaré le porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric, lors de son point-presse quotidien.

« Nous soulignons une fois de plus que les parties sont tenues, en vertu du droit international humanitaire, de protéger les civils et les infrastructures civiles », a-t-il ajouté.

Boris Johnson a condamné la frappe, qui montre selon lui « la cruauté et la barbarie » de Vladimir Poutine et ne fait que « renforcer la détermination » occidentale à soutenir Kyiv.

« Cette attaque épouvantable a montré une fois de plus les profondeurs de la cruauté et de la barbarie dans lesquelles le dirigeant russe est prêt à tomber », a déclaré le premier ministre britannique dans un communiqué.

« Poutine doit comprendre que son comportement ne fera que renforcer la détermination du Royaume-Uni et de tous les autres pays du G7 à soutenir l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra », a-t-il ajouté.

Huit morts à Lyssytchansk

Au moins huit civils ukrainiens ont été tués et 21 autres blessés dans un bombardement russe lundi pendant qu’ils collectaient de l’eau à Lyssytchansk (Est), ville jumelle de celle de Sievierodonetsk récemment prise par les forces de Moscou, a annoncé le gouverneur régional.

« Les Russes ont tiré sur une foule de gens avec des lance-roquettes multiples Ouragan, au moment où les civils collectaient de l’eau à partir d’une citerne. Huit habitants de Lyssytchansk sont morts, 21 ont été emmenés à l’hôpital », a écrit sur Telegram Serguiï Gaïdaï, le gouverneur de la région de Louhansk.

Cette localité est la prochaine cible des forces russes après leur occupation totale de Sievierodonetsk, au terme de plusieurs semaines de combats qui ont ravagé les deux cités et qui ont aussi provoqué la mort de dizaines de civils.

C’est la dernière grande ville qu’il reste à conquérir pour les Russes dans la région de Louhansk, l’une des deux provinces du bassin industriel du Donbass.

L’armée ukrainienne avait annoncé vendredi son retrait de Sievierodonetsk pour mieux défendre Lyssytchansk, où se déroulent des affrontements de rue selon les séparatistes prorusses qui combattent aux côtés des forces de Moscou.

M. Gaïdaï avait signalé la semaine dernière que les combats causaient des « destructions catastrophiques » à Lyssytchansk, qui comptait environ 100 000 habitants avant la guerre.