(Toronto) Les Canadiens seront parmi les premiers à pouvoir utiliser un bouton de modification de messages que Twitter lancera ce mois-ci.

La fonctionnalité, annoncée mercredi, sera disponible pour les abonnés canadiens de Twitter Blue, le service d’abonnement payant de la société qui n’a été lancé qu’au Canada, aux États-Unis, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Les équipes internes de Twitter ont déjà commencé leurs tests, et ceux-ci seront étendus aux abonnés de Twitter Blue vers la fin de septembre.

La fonctionnalité permettra aux abonnés de modifier « plusieurs fois » leurs tweets, d’ajouter ou de supprimer des balises et de réorganiser les médias joints, dans les 30 minutes suivant leur publication. Les messages modifiés seront marqués d’une icône et d’un libellé indiquant qu’ils ont été modifiés et les utilisateurs auront accès à un historique horodaté des modifications.

La société a conçu le bouton d’édition – sa « fonctionnalité la plus demandée à ce jour » – comme un moyen de réduire la frustration liée au fait de devoir supprimer un tweet ou de laisser une faute de frappe affichée, car il n’existe actuellement aucun moyen de modifier les messages.

« Nous espérons qu’avec la disponibilité de [cette] fonction, Twitter sera plus accessible et moins intimidant », explique un article de blogue officiel de Twitter au sujet du changement.

Le déploiement de l’outil intervient alors que le Canada cherche à réglementer les entreprises de technologie et que la pression monte pour lutter contre le harcèlement en ligne.

« Mais si nous cherchons un outil qui rendra Twitter plus productif et accueillant, et un endroit sain, ce n’est pas celui-là », a estimé Natasha Tusikov, professeure adjointe de sciences sociales à l’Université York.

« Si Twitter espère qu’un outil d’édition améliorera le discours public et en fera une place publique plus sûre, plus productive et plus engageante, cela ne se produira absolument pas. Cela ne touche aucun des problèmes structurels de Twitter. »

Parmi ses plus gros problèmes figurent les trolls, le doxing et le harcèlement qui sévissent sur la plateforme et ne sont souvent pas traités par Twitter et par les forces de l’ordre, a ajouté Mme Tusikov.

Le doxing est la publication en ligne d’informations personnelles, notamment les adresses résidentielles, dans le but d’intimider.

Des craintes

Mme Tusikov craint que des personnes ayant des intentions malveillantes ne publient un message, puis le modifient en quelque chose d’autre de désobligeant ou de haineux à mesure qu’il commence à devenir viral.

Un utilisateur qui a déjà « aimé » ou retransmis le message d’origine pourrait ne pas être au courant de ces changements, à moins de revoir le message, mais il y sera relié.

Richard Lachman, professeur de médias numériques à la Metropolitan University de Toronto, a souligné qu’il incomberait également aux gens de remarquer quelles modifications ont été apportées aux messages et a rappelé que l’humanité n’avait pas un excellent bilan en ce qui a trait à l’attention portée aux détails de tweets.

« L’internet n’a pas l’habitude de lire les choses très attentivement, a-t-il affirmé. Il est habitué à voir ce qui est juste là, pas la remarque en petits caractères qui indique que cela a été modifié. »

La version du bouton d’édition que les abonnés de Twitter Blue pourront tester ne sera peut-être pas celle qui sera finalement déployée pour tous les utilisateurs.

Le test sera d’abord localisé dans un seul pays, mais la fonctionnalité sera peaufinée et étendue au fur et à mesure que Twitter apprendra et observera comment les gens l’utilisent. Comme l’a indiqué la société sur son blogue : « On n’est jamais trop prudent. »

Dispute avec Elon Musk

Le lancement du bouton d’édition des messages survient alors que Twitter est engagé dans une bataille juridique avec l’entrepreneur technologique Elon Musk, qui devait acheter la société de médias sociaux pour 44 milliards US. Il s’est depuis retiré de l’accord en affirmant que Twitter comptait plus de comptes robotisés qu’elle ne l’avait révélé, mais Twitter poursuit M. Musk pour forcer la vente à se concrétiser.

Elon Musk avait interrogé les utilisateurs du réseau social, plus tôt cette année, pour savoir s’ils aimeraient avoir accès à un bouton d’édition, et 73,6 % des répondants ont indiqué qu’ils seraient favorables à ce changement.

Il est difficile de savoir pourquoi Twitter a choisi ce moment pour lever le voile sur son bouton d’édition et si M. Musk a quelque chose à voir avec la décision, mais l’échec de l’accord pourrait « pousser [l’entreprise] à être beaucoup plus sérieuse en ce qui a trait à la croissance de ses revenus », a estimé M. Lachman.