(New York) Il a fait l’objet de deux procédures de destitution. Il est la cible de plusieurs enquêtes criminelles. Et il est vilipendé par les dirigeants de son propre parti.

D’autres que Donald Trump pourraient se sentir accablés face à tant d’adversité. Mais le désir de l’ancien président républicain de regagner la Maison-Blanche est si brûlant, si lancinant, qu’il est prêt à se soumettre à une épreuve dont il aurait préféré faire l’économie, à savoir une troisième campagne présidentielle.

Ainsi, devant des membres de sa famille et des partisans réunis dans une salle de bal de son club privé de Palm Beach, en Floride, le prédécesseur de Joe Biden a déclaré mardi soir sa candidature à l’élection présidentielle de 2024. Cette annonce attendue intervenait une semaine seulement après des élections de mi-mandat qui ont vu de nombreux candidats associés à son mouvement politique essuyer des défaites cinglantes.

Mais le 45e président des États-Unis n’a pas fait allusion à ces résultats décevants, qui ont notamment coûté la majorité au Sénat aux républicains. Seul son manque d’énergie a pu trahir l’humiliation qu’il a encaissée la semaine dernière.

« Une grande nation »

« Le retour de l’Amérique commence maintenant », a-t-il déclaré au début d’un discours prononcé d’une voix éteinte et au cours duquel il a vanté son bilan à la présidence, marqué selon lui par « la plus grande économie » de l’histoire, et dénoncé celui de Joe Biden, caractérisé à son avis par « la douleur, les difficultés, l’anxiété et le désespoir ».

« Il y a deux ans, nous étions une grande nation et bientôt nous le serons à nouveau », a-t-il dit, suscitant les applaudissements de ses partisans massés devant une scène décorée par une rangée de drapeaux américains.

Le déclin de l’Amérique nous est imposé par Joe Biden et les fous de la gauche radicale qui mènent notre gouvernement à la ruine. Ce déclin n’est pas un destin que nous devons accepter.

Donald Trump

« Afin de rendre à l’Amérique sa grandeur et sa gloire, j’annonce ce soir ma candidature à la présidence des États-Unis », a-t-il ajouté quelques minutes plus tard.

Fait remarquable : Donald Trump ne s’est pas étendu sur l’élection présidentielle de 2020 et ses allégations mensongères de fraude électorale, comme il le fait habituellement. De toute évidence, il a suivi la consigne de ses conseillers, qui l’avaient prié de ne pas revenir sur ce sujet qui a contribué aux défaites de plusieurs des candidats les plus trumpistes lors des élections de mi-mandat.

  • Donald Trump, lors de son discours dans une salle de bal de son club privé de Palm Beach, en Floride

    PHOTO ANDREW HARNIK, ASSOCIATED PRESS

    Donald Trump, lors de son discours dans une salle de bal de son club privé de Palm Beach, en Floride

  • Donald Trump et sa femme, l’ancienne Première dame Mélania Trump, à Mar-a-Lago

    PHOTO ALON SKUY, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Donald Trump et sa femme, l’ancienne Première dame Mélania Trump, à Mar-a-Lago

  • Des membres de la famille et partisans de l’ancien président étaient présents mardi soir, notamment Kimberly Guilfoyle, Jared Kushner, Eric Trump et la femme de ce dernier, Lara.

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    Des membres de la famille et partisans de l’ancien président étaient présents mardi soir, notamment Kimberly Guilfoyle, Jared Kushner, Eric Trump et la femme de ce dernier, Lara.

  • De nombreux partisans étaient également à l’extérieur de la résidence de l’ancien président pour célébrer son annonce.

    PHOTO GIORGIO VIERA, AGENCE FRANCE-PRESSE

    De nombreux partisans étaient également à l’extérieur de la résidence de l’ancien président pour célébrer son annonce.

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Donald Trump n’a pas non plus expliqué pourquoi il a procédé à l’annonce de sa candidature de façon si hâtive. Lors de sa première campagne présidentielle, il avait attendu au 16 juin 2015 avant de descendre l’escalier mécanique de la Trump Tower pour confirmer ses ambitions politiques.

Parmi les explications le plus souvent mentionnées figure le désir de devancer non seulement ses rivaux potentiels, dont le gouverneur républicain de Floride Ron DeSantis, mais également le ministère de la Justice.

L’ancien président estimerait qu’une autre candidature présidentielle l’aiderait à dépeindre toute inculpation éventuelle comme une énième attaque politique. Il a d’ailleurs établi un lien lors de son discours entre l’enquête du FBI sur l’ingérence russe lors de l’élection présidentielle de 2016 et la perquisition récente de Mar-a-Lago.

Donald Trump n’est pas le premier ancien président à repartir à la conquête de la Maison-Blanche après en avoir été évincé. Un seul y est parvenu : Grover Cleveland, dont le second mandat s’est étendu de 1893 à 1897.

Mésentente chez les républicains

La « grande annonce » de Donald Trump réjouira bon nombre de ses partisans inconditionnels. Elise Stefanik, numéro trois du groupe républicain de la Chambre des représentants, l’a saluée avant même qu’elle soit officialisée.

« Je suis fière de soutenir Donald Trump pour la présidence en 2024 », a déclaré la représentante de l'état de New York. « Il est temps pour les républicains de s’unir autour du républicain le plus populaire d’Amérique qui a fait ses preuves en matière de gouvernance conservatrice. »

Mais cette réaction n’est pas universelle, tant s’en faut. Dimanche, sur CNN, le gouverneur républicain du Maryland, Larry Hogan, a exprimé une opposition plus répandue au sein de l’élite du Grand Old Party. Il a rappelé que les élections de mi-mandat étaient « le troisième scrutin d’affilée où Donald Trump a causé notre perte », les deux précédents étant ceux de 2018 et 2020, selon lui.

Donald Trump a peut-être aussi perdu l’un de ses plus grands alliés parmi les médias conservateurs. Après les élections de mi-mandat, le patron de NewsCorp, Rupert Murdoch, lui a dit qu’il ne pourrait pas compter sur l’appui des médias de son groupe s’il donnait suite à son idée de briguer la présidence en 2024, selon le quotidien britannique i.

Font partie de NewsCorp Fox News, le Wall Street Journal et le New York Post, entre autres.

« Nous avons été clairs avec Donald. Il y a eu des conversations entre eux au cours desquelles Rupert a fait comprendre à Donald que nous ne pouvions pas soutenir une autre course à la Maison-Blanche », a déclaré une source haut placée de NewsCorp au journal i.

N’empêche : l’animateur de Fox News Sean Hannity et ses invités ont accueilli avec enthousiasme l’annonce de Donald Trump mardi soir.

Ron DeSantis, lui, n’a pas ajouté mardi aux critiques formulées à l’endroit de Donald Trump depuis les élections de mi-mandat. Il n’a cependant pas cherché à minimiser l’ampleur des défaites subies par les républicains.

« C’était une performance extrêmement décevante, d’autant plus que les politiques de Biden sont très largement impopulaires », a-t-il dit lors de sa première conférence de presse depuis sa réélection éclatante.

Quand les journalistes ont tenté de lui soutirer un commentaire sur les ambitions présidentielles de Donald Trump, le gouverneur de Floride s’est contenté de mettre en valeur sa propre victoire, remportée par 19 points de pourcentage.

« Au bout du compte, je dirais simplement aux gens d’aller voir le tableau d’affichage de mardi soir dernier », a-t-il dit.