(Le Caire) Vingt-deux chars transportant des momies de rois et reines de l’Égypte antique ont défilé samedi soir dans les rues du Caire lors d’un spectacle grandiose, pour rejoindre le Musée national de la civilisation égyptienne (NMEC), nouvelle demeure des dépouilles royales.

Encadrés d’une garde montée, les premiers chars noirs ornés de motifs dorés et lumineux rappelant les embarcations funéraires antiques ont quitté à 20 h (18 h GMT) la place Tahrir et le musée du Caire, où les momies reposaient depuis plus d’un siècle.

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  • Le véhicule transportant la dépouille de la reine Ahmès-Néfertari.

    PHOTO KHALED DESOUKI, AFP

    Le véhicule transportant la dépouille de la reine Ahmès-Néfertari.

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  • Des artistes performent une chorégraphie devant les pyramides non loin du Musée national de la civilisation égyptienne.

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    Des artistes performent une chorégraphie devant les pyramides non loin du Musée national de la civilisation égyptienne.

  • Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi

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    Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi

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La place était fermée à la circulation ainsi qu’aux piétons, comme l’ensemble du trajet de quelque sept kilomètres à travers les rues du Caire, jusqu’au NMEC situé dans le sud de la capitale.

Sous les coups de canon, les chars sont arrivés au nouveau musée vers 20 h 30, accueillis par le président Abdel Fattah al-Sissi.

Le spectacle était diffusé en direct à la télévision égyptienne et sur Twitter, le hashtag en arabe #convoi_des_momies_royales faisait partie des tendances mondiales en vogue.

Figurants en costume

Dans l’ordre chronologique, le pharaon Seqenenre Tâa (XVIe siècle avant J-C.), surnommé « le courageux », a ouvert la marche, fermée par Ramsès IX (XIIe siècle avant J-C.). Parmi les momies les plus connues figurent celles des souverains Hatchepsout et Ramsès II.

Baignée dans une lumière bleue, la procession a quitté le musée centenaire, accompagnée par des figurants en costume pharaonique, de chars tirés par des chevaux, sous les battements de tambours d’une fanfare et sur fond de musique symphonique.   

Peu avant le début du défilé, une chanson du très populaire chanteur égyptien Mohamed Mounir, composée pour l’occasion, avait ouvert les festivités. Plusieurs acteurs égyptiens dont Ahmed Zaki, Mona Zaki et la Tunisienne Hend Sabry ont récité des textes sur la civilisation égyptienne.

Au total, 60 motos, 150 chevaux, 330 figurants (étudiants en sport), 150 musiciens et 150 percussionnistes du ministère de la Défense ont été mobilisés pour l’évènement, selon les autorités.

Plus tôt dans la soirée, le président Sissi s’est rendu au NMEC, accompagné de son premier ministre Mostafa Madbouli et de la directrice générale de l’UNESCO Audrey Azoulay, pour passer en revue une partie des collections.

« Mieux conserver, mieux exposer »

« Avec une grande fierté, je me réjouis d’accueillir des rois et reines d’Égypte après leur trajet », avait tweeté plus tôt M. Sissi.

Le NMEC, qui occupe un vaste bâtiment moderne, doit ouvrir ses portes au public le 4 avril. Mais les momies ne seront exposées au public qu’à partir du 18 avril.

Mme Azoulay a estimé, dans un communiqué, que le déménagement des momies vers le NMEC était « l’aboutissement d’un long travail pour mieux les conserver et mieux les exposer ».  Un travail auquel l’UNESCO a participé.

Découvertes près de Louxor (sud) à partir de 1881, la plupart des 22 momies n’avaient pas quitté la place Tahrir depuis le début du XXe siècle.

Depuis les années 1950, elles y étaient exposées dans une petite salle, sans explications muséographiques claires.

Au NMEC, elles apparaitront dans des caissons plus modernes « pour un contrôle de la température et l’humidité meilleur qu’au vieux musée », explique à l’AFP Salima Ikram, professeure d’Égyptologie à l’Université américaine du Caire, spécialiste de la momification.

Elles seront présentées aux côtés de leurs sarcophages, dans un décor rappelant les tombes souterraines des rois, avec une biographie et des objets liés aux souverains.

Le caractère macabre des momies a par le passé rebuté plus d’un visiteur. « Je n’oublierai jamais lorsque j’ai emmené (la princesse) Margaret, sœur de la reine Élisabeth II, au musée : elle a fermé les yeux et est partie en courant », raconte le célèbre archéologue égyptien Zahi Hawass.

Malédiction des pharaons

Après des années d’instabilité politique liées à la révolte populaire de 2011, qui a porté un coup dur au tourisme, l’Égypte cherche à faire revenir les visiteurs, notamment en promouvant la culture.

Outre le NMEC, l’Égypte doit inaugurer d’ici quelques mois le Grand musée égyptien (GEM) près des pyramides de Guizeh, qui abritera des collections pharaoniques.

« Le musée de la place Tahrir ne mourra pas, on va le développer », a par ailleurs assuré samedi soir le ministre des Antiquités et du Tourisme, Khaled al-Enany.

Quelques jours avant l’évènement, sous le hashtag en arabe #malédiction_des_pharaons, de nombreux internautes ont associé les récentes catastrophes survenues en Égypte à une « malédiction » qui aurait été provoquée par le déplacement des momies.

En une semaine, l’Égypte a connu le blocage du canal de Suez par un porte-conteneurs, un accident de train qui a fait 18 morts à Sohag (sud) et l’effondrement d’un immeuble au Caire qui a entraîné la mort d’au moins 25 personnes.

La « malédiction du pharaon » avait déjà été évoquée dans les années 1920 après la découverte de la tombe de Toutankhamon, suivie des décès jugés mystérieux de membres de l’équipe d’archéologues.