Les théâtres, cinémas, amphithéâtres et plateaux de tournage pourront accueillir le public au maximum de leur capacité dès le 8 octobre prochain, ont annoncé jeudi les autorités gouvernementales. Mais ce qui est annoncé comme une « bouffée d’air » pour la culture n’améliore pas la situation de plusieurs salles de spectacle, dont la jauge de spectateurs ne pourra augmenter.

Le ministre de la Santé et de Services sociaux, Christian Dubé, et son homologue de la Culture et des Communications, Nathalie Roy, ont fait l’annonce de ces assouplissements dans le milieu culturel lors d’un point de presse, en compagnie du directeur national de santé publique, Horacio Arruda.

Le gouvernement donne désormais la permission aux lieux culturels de ne plus limiter leur capacité d’accueil, tant que les conditions sont conformes à certains critères. « On va pouvoir revivre avec beaucoup d’émotions l’énergie d’une salle de spectacle pleine, ce qui ne s’est pas vu depuis plus de 19 mois », a assuré Nathalie Roy.

Les cinémas, les théâtres et les salles de spectacle munis de sièges fixes pourront se remplir au maximum de leur capacité dès le 8 octobre. Les plateaux de tournage seront soumis aux mêmes règles et pourront ainsi accueillir le public sans restriction. Les évènements artistiques et musicaux dans des amphithéâtres comme le Centre Bell n’auront plus à se plier à une quelconque restriction d’accueil, à condition que tous les spectateurs aient des places assises, ont précisé les représentants gouvernementaux jeudi lors du point de presse.

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Le gouvernement donne la permission aux lieux culturels de ne plus limiter leur capacité d’accueil.

Le passeport vaccinal est évidemment toujours requis dans chacun de ces lieux et le port du masque devient obligatoire en tout temps (mis à part pour manger ou boire), alors qu’il ne l’était plus à la suite des derniers assouplissements.

« Il n’y a pas eu d’éclosion dans les salles de spectacle, il n’y a pas eu d’éclosion sur les plateaux de tournage », a affirmé le DHoracio Arruda pour expliquer ces nouveaux allègements.

Le désavantage du parterre

Si tout cela représente de bonnes nouvelles pour bien des établissements culturels, le porte-parole de l’Association des salles de spectacle indépendantes du Québec (ASSIQ) et président du Club Soda, Michel Sabourin, voit cette annonce comme « une injustice totale ».

Les assouplissements ne concernent en effet que les salles dont les sièges sont fixes. Or, la majorité des salles indépendantes abritent un parterre et quelques-unes ont également une section de places assises. Dans plusieurs cas, les lieux étaient aménagés ces derniers mois en formule cabaret (une table et des chaises), de manière à ce que les spectateurs puissent occuper le parterre.

Comme pour les restaurants, cette configuration exige une distanciation de deux mètres entre les tables. Il ne leur sera pas permis d’ajouter des tables pour remplir l’espace.

Toutes nos salles à Montréal ou à Québec — le Capitole, L’Impérial, le MTELUS, le Club Soda, la SAT, etc. — seront incapables [d’augmenter leur capacité].

Michel Sabourin, porte-parole de l’Association des salles de spectacle indépendantes du Québec

M. Sabourin estime que les nouvelles consignes sont « floues ». « Il faudra garder la distanciation. On est des oubliés. »

À part le Théâtre St-Denis, la vingtaine de salles de l’ASSIQ se retrouvent « désavantagées » par les nouvelles mesures, estime-t-il.

« J’ai déjà eu des appels de quatre personnes pour me dire qu’elles vont déplacer leurs shows, raconte Michel Sabourin. Si elles peuvent vendre plus de places au Monument-National, par exemple, mais pas au Club Soda, elles vont y aller. »

L’attaché de presse au cabinet de la ministre de la Culture, Louis-Julien Dufresne, précise que « les salles qui veulent se servir de leur parterre pour mettre des rangées peuvent le faire sans problème, tant qu’il y a des places assises fixes ».

« Le diable est dans les détails et on le comprend », affirme M. Dufresne, assurant que le Ministère répondra aux interrogations des propriétaires de salles.

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Sur les sites extérieurs, comme au festival Osheaga, la capacité d’accueil maximal est de 15 000 personnes, avec des sections de 500 personnes.

Déception dans les festivals

« On est un peu découragés », a de son côté commenté Martin Roy, président-directeur général du Regroupement des évènements majeurs internationaux (RÉMI), joint par téléphone jeudi. Alors qu’il « reste quelques festivals dans la saison », c’est comme si les autorités pensaient que les festivals « c’est derrière nous, qu’il n’y a pas de presse », avance M. Roy.

Selon lui, c’est sous-estimer l’ampleur de l’organisation d’un festival. « Il y a un besoin de prévisibilité par rapport aux évènements de l’hiver, qui peuvent paraître loin, mais qui, en termes d’organisation, arrivent bientôt, dit le PDG du RÉMI. Igloofest, en janvier, c’est dans trois mois seulement. »

Le problème qui subsiste depuis des mois maintenant, affirme Martin Roy, c’est « le manque d’horizon ». « On est dans une espèce de néant, ajoute-t-il. On s’est démené pour l’implantation du passeport vaccinal. Au bout du compte, on n’a pas les assouplissements que l’on voudrait avoir. »

Sur les sites extérieurs, la capacité d’accueil actuelle est de 15 000 personnes, avec des sections de 500 personnes. Dans les cas où les évènements n’ont pas de places assignées, le respect des mesures sanitaires est requis en tout temps. Lorsque des places assises sont assignées, les sections ne seront plus obligatoires à partir du 8 octobre. Mais les grands festivals n’accueillent pour la plupart pas de spectateurs assis sur leurs parterres.

« On n’est pas en train de demander que les jauges passent de 15 000 à 60 000 ou 90 000. On est sur des propositions que l’on pense raisonnables : des zones de 1000 plutôt que des zones de 500 ou bien réduire le métrage carré par festivalier », illustre Martin Roy.

Après quelques évènements tenus avec succès ces dernières semaines, le festival Osheaga se tiendra ce week-end dans l’île Sainte-Hélène. « Ça aurait été bien pour Osheaga et pour les quelques jours du Piknic [Electronik] restants qu’il y ait des changements », soulève Martin Roy, qui regarde la situation à l’international et constate un retard au Québec.

On nous dit qu’il pourra y avoir jusqu’à 20 000 personnes dans un amphithéâtre [la capacité du Centre Bell, environ], mais pas plus de 15 000 dehors. […] On est déçus.

Martin Roy, président-directeur général du Regroupement des évènements majeurs internationaux

Le Piknic Électronik a annoncé jeudi après-midi l’annulation du OFF-Piknic prévu ce week-end. La représentation d'All Day I Dream de samedi est reportée au 17 septembre 2022. « Nous étions remplis d’espoir avec les annonces d’allègement des mesures sanitaires pour la culture aujourd’hui, a écrit l’organisation dans un communiqué sur les réseaux sociaux. Tout comme vous, nous sommes absolument déçus que ces nouvelles mesures d’assouplissement s’adressent exclusivement aux spectacles et évènements avec places assises, ce qui, vous le comprendrez, est un non-sens à Piknic. »

Le cinéma et les orchestres

Dans les cinémas, toujours sur présentation du passeport vaccinal, un maximum de 500 personnes par salle est actuellement admis. Ils pourront également accueillir des spectateurs au maximum de leur capacité à partir du 8 octobre.

La ministre de la Culture et le ministre de la Santé et des Services sociaux ont aussi annoncé jeudi des changements pour les activités d’orchestres, de chorales et d’harmonies, qui pourront désormais avoir jusqu’à 100 personnes sur scène (plutôt que 25). Des mesures de distanciation de deux mètres s’appliqueront aux chanteurs et musiciens avec des instruments à vent, pour éviter la dispersion de gouttelettes.