À la lumière de la performance et des mesures de redressement présentées il y a deux semaines par le Groupe TVA, un investisseur institutionnel croit que Québecor ferait une bonne affaire en fermant le capital du diffuseur montréalais.

Québecor, qui contrôle 65 % des actions du Groupe TVA, a annoncé en février l’élimination de 240 emplois, dont plus de la moitié chez TVA, pour l’aider à rétablir ses finances.

« C’est maintenant encore plus logique de fermer le capital de TVA au lieu de mettre du monde à la porte », lance le gestionnaire de portefeuille Stephen Takacsy, de la firme Gestion Lester.

« Puisque TVA veut réduire ses dépenses et a annoncé des suppressions d’emplois, la compagnie ferait bien d’économiser des millions en frais d’administration de société publique, et de conformité et gouvernance pour gérer les conflits d’intérêts potentiels entre TVA, Vidéotron, Québecor, etc., en fermant le capital et en rachetant ainsi les actionnaires minoritaires pendant que le prix de l’action est bas », précise-t-il.

« Et après ça, Québecor aura 100 % accès aux cash flow de TVA. »

Il y a 13,7 millions d’actions de catégorie B du Groupe TVA en circulation. En offrant 4 $ par action, c’est-à-dire une prime de plus de 100 % par rapport au cours boursier actuel, Stephen Takacsy calcule qu’il en coûterait « seulement » 55 millions de dollars à Québecor pour fermer le capital de TVA.

« C’est des peanuts pour une entreprise dans la situation financière de Québecor », dit-il.

L’action de TVA vaut actuellement 1,70 $ à la Bourse de Toronto, mais valait plus de 20 $ au début des années 2000. Des rumeurs de fermeture du capital avaient circulé il y a une douzaine d’années alors que le titre valait encore un peu plus de 10 $. L’action a considérablement chuté depuis.

Stephen Takacsy évalue qu’un retrait de la filiale de Québecor Média de la Bourse permettrait des économies annuelles de 2 à 3 millions uniquement liées aux frais d’administration d’une entreprise publique.

Appelée à réagir aux propos de ce gestionnaire d’actifs, la direction de Québecor opte pour la prudence. « Selon les règles de valeurs mobilières, si une décision en la matière était prise, tous devraient être informés en même temps. Nous ne commenterons donc pas », répond l’entreprise par courriel.

Freedom Mobile, une stratégie « gagnante »

Gestion Lester est actionnaire de longue date du Groupe TVA. Cette firme est aussi actionnaire de Québecor et dit avoir récemment bonifié sa participation dans le conglomérat québécois dont la principale filiale est Vidéotron. Outre des actions de Québecor, Gestion Lester dit aussi détenir des obligations corporatives de l’entreprise.

« Québecor représente la plus importante portion de notre stratégie de revenus fixes, précise Stephen Takacsy. Les actifs de télécommunications sont des actifs de haute qualité. »

Il explique que Gestion Lester a acheté des actions de Québecor dernièrement parce qu’il croit que l’entreprise sortira gagnante de la transaction par laquelle Rogers souhaite acquérir Shaw et céder Freedom Mobile – la filiale sans fil de Shaw – à Québecor pour lui permettre d’étendre ses activités en Ontario et dans l’Ouest canadien.

« Ce sera positif pour Québecor et le titre de l’entreprise n’est vraiment pas cher, dit Stephen Takacsy. Le prix payé pour Freedom [2,8 milliards] est inférieur à ce que le marché anticipait, ce qui implique un endettement inférieur à ce que le marché anticipait, et pas d’émission d’actions pour financer la transaction alors que le marché se souciait d’une dilution potentielle. »

« Les perspectives de Québecor sont très intéressantes par rapport à la valeur actuelle du titre », ajoute-t-il.

Avenir de TVA Sports

Indépendamment de la décision de fermer ou non le capital de TVA, Stephen Takacsy croit que le contrat signé en partenariat avec Rogers pour diffuser les matchs de la Ligue nationale de hockey (LNH) ne devrait pas être renouvelé. « Du moins pas à ce prix », dit-il.

Québecor avait annoncé en 2013 une entente de 12 ans évaluée à 700 millions pour devenir le diffuseur francophone officiel de la LNH au pays.

La baisse de rentabilité de TVA Sports, une chaîne lancée en 2011, est un des principaux facteurs évoqués par la direction il y a deux semaines pour expliquer les résultats du Groupe TVA et la mise en place d’un plan de restructuration.

Le grand patron de Québecor, Pierre Karl Péladeau, a par la suite laissé planer un doute sur l’avenir de TVA Sports au micro de Paul Arcand, au 98,5 FM. « Il y a un certain nombre de considérations qui ne militent pas dans la perspective d’une réussite en ce qui concerne TVA Sports », a-t-il dit.

Ce ne serait pas la première fois que TVA procéderait à la fermeture d’une chaîne relativement jeune dans l’histoire récente de l’entreprise. Déficitaire, la chaîne d’informations économiques et financières Canal Argent avait été fermée en 2016 après 11 ans en ondes.