(Ottawa) Un comité des Communes se penchera sur la décision de Google de bloquer à des utilisateurs canadiens l’accès à des sites de nouvelles. Le projet pilote du géant du web, démarré en réaction à l’étude d’un projet de loi qui lui déplaît, a été taxé de « grave erreur » par Justin Trudeau.

Le Comité permanent du patrimoine canadien se réunira ce mardi, à la demande des libéraux, des bloquistes et des néo-démocrates, pour déterminer les modalités de l’étude de « la censure des contenus des nouvelles par Google ».

La mesure législative à laquelle la société s’oppose, C-18, a déjà été adoptée en Chambre. À l’exception d’un député, tous les élus du Parti conservateur ont voté contre lors de sa mise aux voix, au mois de décembre dernier.

L’objectif de C-18 est notamment de contraindre les géants du web comme Google à conclure des accords qui dédommageraient les médias canadiens pour le contenu qui est republié sur leurs plateformes numériques. Et alors que le projet de loi est à l’étape de l’étude au Sénat, la société a procédé à des « tests » de censure.

Google a verrouillé pour moins de 4 % des utilisateurs canadiens de ses produits l’accès au contenu d’actualités, y compris son moteur de recherche et la fonction Discover sur les appareils Android qui diffusent des nouvelles et des reportages sportifs, comme l’a révélé La Presse Canadienne mercredi dernier.

« Nous testons brièvement les réponses potentielles des produits au projet de loi C-18 qui ont un impact sur un très petit pourcentage d’utilisateurs canadiens », a affirmé à l’agence de presse le porte-parole de Google, Shay Purdy, dans une déclaration écrite.

Au Canada comme en Australie

Le vice-président du comité, le bloquiste Martin Champoux, a été choqué de voir Google refaire au Canada le coup qu’il avait fait en Australie, alors que les législateurs se penchaient sur une législation comparable, et que le géant du web avait bloqué l’accès à des sites de nouvelles australiens « à titre expérimental ».

« Ça s’apparente un peu, comme manœuvre, constate-t-il en entrevue. Et je pense que c’est naturel que les partis qui défendent C-18 s’insurgent de voir que Google essaie de jouer les gros bras et de faire un peu d’intimidation avant l’adoption du projet de loi. »

Le flou des critères sur lesquels la multinationale se fonde afin de mettre du contenu à l’index est par ailleurs « préoccupant », car elle « pénalise un certain type de contenu et choisit quel type de contenu les Canadiens peuvent voir à travers leur moteur de recherche », ce qui suscite « un paquet de questions », souligne-t-il.

Le geste posé par le géant du web a également ulcéré le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, qui ne s’est pas privé de communiquer sa façon de penser. « Les Canadiens ne se laisseront pas intimider », a-t-il écrit sur son compte Twitter en qualifiant le tout de « très décevant ».

Le premier ministre a renchéri, vendredi, déclarant sans être invité à se prononcer sur l’enjeu que c’était une « grave erreur » que Google « préfère empêcher les Canadiens d’accéder aux nouvelles plutôt que de vouloir payer justement les journalistes pour le travail qu’ils font en tant que professionnels ».

Avec La Presse Canadienne et Joël-Denis Bellavance, La Presse